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Sortie Botanique du 24 mars 2018

Journal de la sortie du 24 Mars 2018

Thème

Flore printanière

Organisateur

Agnès GRESET

Lieu

La Miotte à BELFORT

Nombre de participants



Commentaires et photos d'Agnès GRESET

La flore est retardée suite à l'épisode de froid et neige, mais il y a cependant quelques espèces intéressantes.

Cette première sortie, en ce début de printemps, était bien compromise pour observer l’épanouissement des fleurs dans les sous-bois de la Miotte. La neige était encore présente sur les hauteurs de la colline en début de semaine et les températures négatives ! Mais c’était sans compter sur l’optimisme et la persévérance de certaines d’entre elles pour tenir leur calendrier de floraison…

Les anémones sylvie (Anemone nemorosa) encore frileuses, n’avaient pas ouvert leurs corolles blanches sous le brouillard matinal. La mercuriale vivace (Mercurialis perrenis), timide, montrait ses premières feuilles. Ses épis de petites fleurs mâles jaune-verdâtre étaient déjà visibles. Cette plante dioïque qui possède des pieds mâles avec étamines et des pieds femelles avec pistil peut tapisser par endroits le sol de la forêt. Son nom fait référence à Mercure, qui aurait découvert ses propriétés médicinales, mais comme il était aussi le dieu du commerce et des voyages, la faculté de cette plante à disperser facilement son pollen loin d’elle, fait aussi partie de la légende. C’est une euphorbiacée qui n’a pas de lait (latex). Une autre plante de la famille des euphorbes : l’euphorbe des bois ou euphorbe à feuilles d’amandier (Euphorbia amygdaloïdes) possède quant à elle, un lait toxique, particularité de cette famille. Sa tige dressée, rougeâtre, et ses feuilles  regroupées étaient bien développées sur les bords du sentier longeant la crête, mais l’inflorescence était encore cachée.
Les feuilles de l’arum tacheté, entièrement vertes, mais parfois maculées de taches noirâtres, ont fait aussi leur apparition. Ayant la forme d’une pointe de flèche, elles sont dites « sagittées ». A ne pas confondre avec celles de l’ail des ours quand elles sont très jeunes : leur odeur n’est pas la même et elles sont toxiques !
Plusieurs rosettes de feuilles d’un vert brillant, aux nervures parallèles, annonçaient également la floraison de plusieurs pieds d’orchidées. A surveiller !
Dans certains secteurs, l’hépatique trilobée (Hépatica nobilis) ou hépatique noble, encore appelée « herbe de la trinité » (une renonculacée, comme l’anémone) dévoile sa corolle bleue formée de sépales pétaloïdes*, avec en son centre une couronne d’étamines blanches. Cette corolle double de taille lors de la floraison qui peut durer 8 jours pour une fleur. Reconnaissable aussi à ses grosses feuilles formées de 3 lobes qui pourraient évoquer ceux du foie : un exemple de la « théorie des signatures » qui concède à une plante, ayant des ressemblances avec un organe du corps humain, un pouvoir de guérison sur celui-ci.


C’est aussi le cas pour la pulmonaire officinale, dont les feuilles parfois tachetées de blanc évoquent les vésicules pulmonaires ou rappellent l’aspect des poumons atteints par la tuberculeuse. Elle était autrefois utilisée pour soigner cette maladie et les affections respiratoires. La couleur de ses fleurs varie du rose au bleu. Le changement de couleur des fleurs dépend du degré d’acidité de la corolle. D’abord acide quand la fleur est jeune, le PH devient neutre, puis basique : la fleur passe du rose au bleu.
Une découverte pour cette matinée, dans les bois de la Miotte, le « bois joli » ou daphné bois joli (Daphne mezereum). Ce petit arbrisseau rare, qui ne dépasse pas 1m, déploie ses petites fleurs tubulaires s’épanouissant en corolle rose. Elles sont directement fixées sur les rameaux. Les feuilles apparaitront un peu plus tard au dessus d’elles. C’est un laurier des bois poussant à l’abri des rayons du soleil. (Famille des thyméléacées). Pour la légende, son nom de genre vient de la nymphe Daphnée, obligée de fuir l’amour d’Apollon. Cupidon, pour se venger d’Apollon, dieu du soleil, qui s’était moqué de lui, lui décocha une flèche d’amour pour Daphné, mais il blessa aussi la nymphe d’une flèche qui avait l’effet inverse : la répulsion envers Apollon. Daphné n’eut alors de cesse de se cacher du soleil et fut  transformée en laurier rose par son père, le dieu fleuve Pénée*. Son nom d’espèce : mezereum vient d’un mot arabe, signifiant « toxique », car toutes les parties de cet arbuste sont toxiques et peuvent même tuer si l’on ingère une dizaine de ses petits fruits rouges agglomérés sous les feuilles, en période de fructification. Seuls les oiseaux peuvent les consommer. A proximité de ce Daphné, une orchidée desséchée dont la floraison remonte à 2017, arbore son épi de fruits secs ayant perdu ses milliers de petites graines. Cette orchidée sans chlorophylle, ne pouvant réaliser la photosynthèse, s’associe à un champignon pour assurer sa subsistance. Appelée néottie nid d’oiseau, en raison de ses racines entrelacées faisant penser à un nid d’oiseau, elle dépendra toute sa vie de son champignon !
Après cette petite échappée sur les pentes de la colline, les petites fleurs bleues des scilles à 2 feuilles (Scilla bifolia)  que l’on nomme « étoiles bleues », sont à leur apogée. Leurs étamines, elles-mêmes sont bleues ! Leurs deux longues feuilles se terminent par un petit capuchon (feuilles cuculées). Elles continueront à grandir et s’élargir, jusqu’à disparaître après l’arrivée des feuilles des arbres. Cette petite hyacinthacée (ou liliacée suivant la classification) est éphémère, comme beaucoup de plantes qui apparaissent en début de printemps dans les sous-bois, mais son petit bulbe assurera sa pérennité, ainsi que ses graines qui seront disséminées

par les fourmis.


D’autres fleurs roses, violacées ou parfois blanches, débutent leur floraison. Ce sont les corydales devant leur nom au mot grec « Korydalis » qui désigne l’alouette huppée, l’éperon de leurs fleurs ressemblant à une petite huppe… ! En pleine floraison, elle forme des tapis denses sur la crête et les pentes boisées de la Miotte. On peut alors distinguer la corydale à bulbe creux et la corydale à bulbe plein aux petites bractées (sortes de petites feuilles) à la base des fleurs, qui ont une forme différente selon l’espèce. Il n’est pas nécessaire de les déterrer !


Sur la crête, là où le sol a été mis à nu par les fouilles archéologiques d’un village fortifié datant du néolithique (4000 à 2500 ans av. JC) sur le site du Bramont*, des leurs jaunes, les tussilages ou « pas d’âne » (Tussilago farfara), les premières à apparaître au printemps, ont la particularité de fleurir avant l’apparition de leurs feuilles. Cette plante pionnière du bord des chemins, des lisières forestières est une indicatrice de sols rapportés et instables. Elle fait partie de la famille des astéracées. La clandestine de la Miotte, manque cependant à notre tableau printanier. Encore cachée dans le sol, cette orobanche appelée lathrée écailleuse ou clandestine écailleuse a du craindre le froid et la neige, car aucune grappe de fleurs blanches ou rosées ne s’est montrée. Peut-être a-t-elle choisi de fleurir sous terre, ce qui lui arrive parfois. Plante sans chlorophylle, elle puise sa nourriture dans la sève d’un arbre-hôte.


Avant de quitter la colline, le long de la crête, sur les remparts et les pentes ombragées, des fougères, plantes sans fleurs, mais possédant des spores pour se reproduire, déploient leur feuillage toujours vert, même au cœur de l’hiver :

  • le polypode, avec son limbe découpé en lobes,

  • la scolopendre au limbe entier qui tient son nom à la disposition de ses sporanges* en lignes obliques et parallèles, faisant penser à celle des pattes d’un scolopendre (un mille-pattes ou myriapode),

  • le capillaire des murs, dont les divisions du limbe de la feuille en petits lobes arrondis tiennent par un rachis noir (ou nervure principale), ressemblant à un cheveu.

La Miotte, emblème de la ville de Belfort, avec sa tour et ses fortifications, n’a pas fini de nous révéler ses trésors botaniques : rendez-vous pour la découverte des orchidées !

* Sépales pétaloïdes : sépales ayant l’aspect de pétales

* Source : « Besançon en fleurs » de Christophe Hennequin, botaniste au CBNFC.

* Sporange : sac de spores